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Fukushima, près de trois ans et demi de catastrophe

La situation catastrophique provoquée par l’accident de la centrale de Fukushima perdure depuis près de trois ans et demi. Il n’y a jusqu’à présent aucune perspective sérieuse ni de voir les menaces nucléaires s’écarter ni de pouvoir affranchir la population des incertitudes pesant sur sa santé.


Une note plus complète peut être téléchargée ici.

Certes TEPCO, après avoir consolidé le bâtiment, est parvenue à retirer une grande partie des barres de combustibles de la piscine du réacteur n°4, mais cela ne peut masquer l’absence de maîtrise d’une véritable bombe à retardement : les cœurs fondus ne sont ni accessibles ni même localisables avec précision. En revanche il faut continuer à injecter des centaines de tonnes d’eau chaque jour dans les enceintes manifestement percées : l’eau fuit de toutes parts et il n’en est récupéré qu’une partie. TEPCO a creusé des puits d’une trentaine de mètres de profondeur autour des réacteurs, près de la mer et en amont ; elle publie régulièrement les résultats des mesures de la radioactivité de l’eau qui s’y trouve. Cette eau qui s’écoule vers la mer est hautement radioactive : si elle est puisée, elle ne peut être rejetée en mer mais doit être stockée et décontaminée auparavant. Près de 400 000 m3 d’eau attendent ainsi déjà dans des citernes dont les ¾ forment une eau très radioactive. Le système de décontamination reste précaire et incomplet. Il ne réglerait pas le problème du stockage de l’énorme quantité de déchets hautement radioactifs (qui s’entassent partout, y compris au bord des routes). Il ne peut ni colmater la fuite de l’eau issue du processus de refroidissement nécessaire des réacteurs fous, ni lutter contre la contamination évidente de la nappe phréatique et de la mer par suite de rejets continus qui la polluent. TEPCO a le projet gigantesque de faire un mur gelé à 30m de profondeur, stoppant l’eau s’échappant des sous-sols de la centrale et se dirigeant vers la mer. Si elle a concocté ce projet c’est bien que la situation est extrêmement grave, Mais la phase de test qui devait s’achever en juin 2014 n’a pas démontré pour le moment sa faisabilité. Il n’y a ainsi, on le comprend, aucune perspective sérieuse de voir les menaces nucléaires s’écarter.

La santé de la population japonaise au regard de la radioactivité est négligée. Immédiatement après les premiers rejets radioactifs dans l’atmosphère, la population n’a été ni éloignée de manière pertinente ni destinataire de pastilles d’iode pour sa protection. Le leitmotiv des autorités officielles est un déni de toute dangerosité sanitaire de la situation, d’un retour à la normale et de la nécessité de relancer le nucléaire. Le plus qu’elles fassent est le suivi médical des 375 000 jeunes de Fukushima. 48% d’entre eux présentent des anomalies de la thyroïde et en trois ans 50 cancers ont été diagnostiqués, une fréquence 56 fois plus forte que la normale, en outre 39 cas sont suspects. On comprend que la population préférerait que l’on fasse évacuer les enfants plutôt que d’en faire un terrain d’expérience. Certaines associations s’y efforcent, certaines leur offrent des séjours de vacances, de « décontamination » ; c’est nécessaire même dans les grandes villes de Fukushima ou de Koriyama, où, sans parler des innombrables points chauds, le niveau de radioactivité officielle « moyen » reste très élevé : 2,2 millisieverts par an à Fukushima et 1,3 à Koriyama bien au-delà de la limite internationale de sécurité à 1 msv/an et promise par les autorités. La population vit donc en permanence au-delà de ces limites sans parler des substances radioactives contenues dans l’alimentation et dans l’eau. Les autorités surveillent le non dépassement des seuils de chaque « produit » mais les organismes subissent des attaques répétées et certaines substances radioactives s’accumulent. Les autorités préfèrent nier l’existence de symptômes de difficulté pour les organismes à lutter dans cet environnement contaminé, tels que les saignements de nez, phénomène rapporté par un célèbre manga qui a déclenché la vindicte des pro-nucléaires. Au-delà de Fukushima, il a été observé dans l’Est du pays, le Kantô, une modification assez générale de la numération leucocytaire qui laisse tout enfant plus faible et moins apte à lutter contre mille et une petites maladies. Tout cela est nié officiellement mais la population voit cependant se maintenir les incertitudes sur sa santé et surtout celle de ses enfants sans perspective autre que d’essayer d’oublier.

Certes des associations, on l’a dit, mènent des actions pour protéger à minima les enfants, d’autres dénoncent les comportements officiels, des protestations régulières sont organisées. En outre le nombre de signataires de la pétition qui cherche à recueillir 10 millions de signatures contre les centrales nucléaires continue d’engranger des soutiens. Deux anciens premiers ministres, Junichi KOIZUMI du parti libéral démocrate qui a dominé toute l’histoire politique du Japon d’après-guerre et qui a lancé le vent de libéralisation économique au Japon se maintenant 5 ans au pouvoir de 2001 à 2006 et Naoto KAN, du parti démocrate du Japon qui était au pouvoir le 11 septembre 2011, font campagne contre l’énergie nucléaire. Les sondages donnent une légère majorité hostile au nucléaire. Mais la passivité parait suffisante aux autorités pour qu’elles ne bougent pas et même restaurent un peu du nucléaire. Elles ont tout au plus un peu de difficulté à faire revenir un % significatif de personnes autres que des personnes âgées dans les villes officiellement autorisées à ré-héberger leur population. Dans le même temps elles nomment, comme membre de l’agence de sûreté nucléaire créée en septembre 2012 pour surveiller de manière indépendante cette industrie, quelqu’un qui en recevait encore des émoluments il y a quelques mois. Et elles projettent de remettre en route des centrales en septembre alors qu’elles étaient toutes arrêtées depuis dix mois.

Ainsi la catastrophe de Fukushima se prolonge, démontrant, s’il est nécessaire, l’inhumanité du nucléaire.



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